Les ministres Bruno Le Maire et Roland Lescure se sont engagés dans un nouveau « plan de bataille » avec les acteurs du solaire photovoltaïque. Nouveaux objectifs, nouvelles contraintes, le tout dans l’esprit du « Net Zero Industry Act » européen.

« Soyons lucides : si nous voulons atteindre la neutralité carbone en 2050, nous ne pouvons pas attendre d’avoir modernisé notre parc nucléaire existant ou d’avoir construit de nouveaux réacteurs », a admis le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, concluant que « nous avons tout intérêt à miser sur l’énergie solaire » dès maintenant. En compagnie de son ministre délégué chargé de l’Énergie et de l’Industrie, Roland Lescure, le locataire de Bercy s’est rendu à Manosque (Alpes-de-Haute-Provence) ce vendredi 5 avril pour délivrer son « plan de bataille pour le solaire ».

Doubler le rythme d’installations dès l’an prochain

En premier lieu, les ministres ont confirmé leur intention de fixer un doublement du rythme d’installation de panneaux photovoltaïques dans la prochaine Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) – à savoir, six gigawatts (GW) de capacité supplémentaire par an dès 2025. Pour cela, le Gouvernement mise sur plusieurs nouvelles dispositions. Depuis le 13 mars dernier, avec la publication de l’arrêté tarifaire des installations sur bâtiment de moins de 500 kilowatts (dit « S21 »), il a augmenté l’objectif de déploiement de 1,3 GW à 1,8 GW par an sur cette tranche spécifique. Bruno Le Maire a par ailleurs annoncé que le décret tant attendu sur l’encadrement de l’agrivoltaïsme sera « publié demain » au Journal officiel. « Ce décret sera accompagné d’un arrêté spécifiant les mesures de contrôles relatives à ces installations afin de garantir une préservation de l’enjeu agricole. » De plus, dans le courant de l’année, les onze directions interdépartementales de routes (DIR) devront lancer des appels à manifestation d’intérêt pour solariser les délaissés routiers.

Toute une cohorte de mesures ont ensuite été regroupées au sein d’un nouveau pacte de filière, dit de « solidarité industrielle photovoltaïque ». Celui-ci « a déjà l’adhérence [sic] de vingt-neuf acteurs de toutes les catégories », a indiqué Roland Lescure, dont des syndicats comme Enerplan ou le SER, des sociétés clientes telles que la SNCF, Lidl ou Boralex et des futurs fabricants dont Carbon et Holosolis (qui devraient bénéficier du nouveau crédit d’impôt pour l’industrie verte, C3IV, pour la construction de leurs méga-usines respectives). « Nous nous donnons deux mois, d’ici à la mi-juin, pour récolter le reste des signatures. »

Mettre la filière en ordre de bataille

D’abord, le Gouvernement ambitionne de développer les capacités françaises sur l’ensemble de la chaîne de fabrication des panneaux photovoltaïques. D’ici 2030, son objectif est d’accueillir 3 à 5 GW sur la chaîne de valeur du silicium, 5 à 10 GW de lingots et de wafers, 5 à 10 GW de cellules, 3 à 5 GW de verre solaire et 3 GW d’onduleurs. « Avec les deux prochaines gigafactories (de Carbon et Holosolis), nous couvrirons déjà 100 % de notre objectif sur les cellules et 50 % sur les lingots et wafers », avance Roland Lescure. Le tout dans l’idée d’atteindre le seuil des 40 % de production nationale sollicitées par le nouveau règlement européen sur l’industrie verte (ou « Net Zero Industry Act »), que les ministres promettent de mettre en œuvre « d’ici à la fin de l’année 2025 ».

Dans cette optique, le pacte de filière prévoit de « promouvoir la résilience (de) l’industrie européenne » en renforçant les critères de l’appel d’offres solaire sur bâtiment (dans un premier temps), en ce qui concerne l’empreinte carbone des panneaux photovoltaïques choisis (en analyse de cycle de vie), et en instaurant une nouvelle prime à la fourniture en panneaux photovoltaïques « bas-carbone » aux entreprises passant par le guichet ouvert pour les petites installations au sol – le tout « dès cet été ». Pour cela, l’État mettra en place un nouvel « induscore » qu’afficheront les panneaux en question : plus le nombre d’étapes de fabrication ont été réalisées en Europe, plus ce score sera élevé.

Ensuite, du côté des industriels, ces derniers devront désormais s’organiser en Groupement des industriels français de l’énergie photovoltaïque (Gifep), sur le modèle du Gifen de leurs homologues de la filière nucléaire, et augmenter leurs effectifs jusqu’à atteindre 60 000 emplois en 2027. Les acheteurs s’engagent à se fournir chez les industriels français à hauteur de 10 % en 2024 (pour des panneaux partiellement ou entièrement fabriqués en France), puis de 30 % après 2025. Une méthode que Roland Lescure compte généraliser « à toutes les filières stratégiques », en commençant par celles des pompes à chaleur « dans les semaines à venir ».

 

source : actu-environnement.com